Apprendre de l'artiste

"De l'art, nous avons à prendre de la graine" J. Lacan

  • Apprendre ?

    "(...) le seul avantage qu'un psychanalyste ait le droit de prendre de sa position, lui fût-elle donc reconnue comme telle, c'est de se rappeler avec Freud qu'en sa matière, l'artiste toujours le précède et qu'il n'a donc pas à faire le psychologue là où l'artiste lui fraie la voie" Jacques Lacan, Autres écrits, Hommage fait à Marguerite Duras, p192.
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« Je vais faire une petite danse » par Christiane Terrisse

Posted by vrdriguez sur 23 septembre 2014

Après trois ans de résidence au théâtre Garonne, la compagnie Maguy Marin fait ses adieux à la ville avec Bit, la quatrième pièce crée à Toulouse en septembre.Bit M M

Sur un plateau partagé par sept plans inclinés six danseurs; trois hommes et trois femmes, exécutent « une petite danse », circonvolutions traditionnelles des farandoles collectives, parade sexuée subtilement perturbée par des ruptures de rythme où le chacun pour soi reprend ses droits et autorise d’enfantines échappées. La chaine évolue avec vaillance entre les plans, les escalade, redescend hors champ, réapparaît ailleurs.

Mais la ferveur populaire va s’épuiser, se défaire en une lente descente de corps dénudés, entrelacés vers une orgie entrainant dans sa chute le drapeau rouge déployé, puis replié quand apparaissent les sombres silhouettes masquées de blanc des religieux qui prennent le relais, la « petite danse » devient procession, l’orgie vire à la tournante, version obscène du un par un.

La séquence se clôt sur un flot de pièces d’or tombant du haut, les moines à leur poursuite.

On peut interpréter cette série comme la mise en images de l’espoir républicain écrasé par le pouvoir dévoyé de la religion, l’origine espagnole de la chorégraphe autorisant cette lecture.

Interlude : trois Parques avec fuseau et ciseaux déambulent sur les traces des danseurs, ponctuation pour mémoire, vanité à l’antique, figures du destin.

Puis vient un pas de deux fascinant : deux mâles nus face à face, reptation de sauriens, gestuelle archaïque se défient, s’affrontent, se poursuivent, incarnent l’éternelle lutte à mort des vivants avant que ne reprenne l’inlassable parade des sexes, séduction, prédation, dérobade.

Les plans inclinés installés à mi plateau ménagent des coulisses propices à des changements de costumes, de la mise populaire à l’étalage de robes brillantes et de noeuds papillon, la ronde se répète, tantôt dans un bel ensemble, tantôt sur le mode exhibition individuelle.

Mais les espaces ménagés entre les plans inclinés, propices au montrer-cacher, apparaître-disparaître se ferment progressivement, plus d’échappées possibles, il ne reste que la sortie par le haut, celle du plongeur de Paestum, chute un par un de l’autre côté.

Bit sera à Paris pour le Festival d’Automne. Allez y voir!

Mais sachez que chaque danseur est muni d’une oreillette qui lui indique un rythme propre, déconnecté de la musique pour tous, que tout se joue entre le un et le multiple et que la performance du spectacle est celle de la vie.

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